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PROJET DE PRISON À NOISEAU : LA COMMUNE LUTTE POUR SES TERRES AGRICOLES

À Noiseau, dans le Val-de-Marne, un projet de prison de 800 places sème la colère chez les derniers agriculteurs de la commune. Menacés d’expropriation, Jacques Fauvarque et ses voisins luttent pour sauver leurs terres et leur mode de vie.

Par Alice Sacco 
Publié le 3 décembre 2025
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Jacques Fauvarque, face au 24 hectares sur lesquels l’Etat projette d’implanter
une prison à l’horizon 2027. @AliceSacco  02/12/2025

“Les problèmes commencent à partir d’ici”. Debout au milieu de son champs, Jacques, le doigt pointé vers un petit chemin de forêt, grimace: “Ça sera la route pour accéder à la prison”.

 

Il y a six ans, lorsqu’il apprend par courrier de la préfecture que huit de ses 34 hectares de production céréalière plantés à Noiseau, dans le Val-de-Marne, sont menacés par l’implantation d’un pénitencier de 800 places, l’agriculteur de 67 ans est déconfit. “On m’a fait comprendre que j’étais quantité négligeable”, confesse-t-il les yeux rivés sur le no man’s land.

Le coupable? L’APIJ (Agence Publique d’Immobilier de la Justice), piloté par l’Etat et décisionnaire de l’emplacement. Le projet d’une prison à Noiseau naît dans le cadre du “plan des 15 000” (voir encadré), sans concertation avec la commune. Le choix des terres agricoles, Jacques l’explique aisément: “On coute pas cher à virer et notre terrain est propre, c’est pas plus compliqué que ça.” Encouragé par le collectif citoyen LARUCHE, Jacques convainc ses voisins, Frédéric et Ludovic Naudier, père et fils, de lutter contre le projet. Ils sont les trois derniers agriculteurs de Noiseau.
 

En 2022, le trio décide de faire appel à des avocats. Ludovic a alors 17 ans et se destine à reprendre les terres de son père, appartenant à sa famille depuis 1921. Aujourd’hui en CAP agricole, il craint la perte des 14 hectares prochainement saisis. “Nos champs sont carrés, on va se retrouver avec des triangles, des pointes, ça triple le temps de travail.”

Grogne Locale

Au centre-ville, Yvan Femel, maire LR des 4 600 habitants de Noiseau, attend que le nouveau ministre de la justice, Didier Migaud, réponde à sa proposition de rencontre adressée fin novembre. Les espoirs sont maigres. En juin 2024, son courrier à Gabriel Attal, alors Premier Ministre, était resté sans suite. “Nous sommes victimes d’un mépris insupportable, regrette-t-il.
 

Pour nous, tout est au conditionnel et au futur”. Il a pourtant reçu le soutien du président du conseil départemental du Val-de-Marne, de la députée MoDem Maud Petit, et même de la présidente de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse. En septembre 2024, elle suggérait
d’agrandir l’autre centre pénitencier historique du 94, Fresnes. Mais, à ce jour, L’APIJ ne s’exprime plus au sujet de Noiseau. L’OIP (Organisation International des Prisons), y voit une certaine logique: “Ces exploitants pratiquent une agriculture intensive. S’il s’agissait de circuit court, soucieux de l’environnement, ce serait plus défendable”.

 

Sur le marché de Noël, Isabelle Pagot, vin chaud à la main, tient un étalage de bijoux confectionnés à partir des grains de la famille Naudier. “J’en incruste exactement sept dans de la résine, précise la noiséenne, comme les sept grains de la chance”. Taillés en boucles d’oreilles ou

bracelets et vendus 20 euros pièce, ils serviront à payer les frais d’avocats des agriculteurs. Une action “complémentaire avec le travail des élus”, assure cette mère de famille, membre du collectif citoyen LARUCHE, créé en 2018.
 

Leur dernière initiative consiste à créer un compte TikTok, @tiktokisa, suivi par 5 500 abonnés. Ludovic Naudier y met en scène sa lutte contre le projet pénitentiaire. Le 16 août 2023, il y donnait son proverbe préféré: “L’agriculture c’est comme un arc-en-ciel, on en voit de toutes les
couleurs.” Affaire à suivre : la prison devrait voir le jour d’ici à 2027.

​

AS

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